Le marxisme analytique a profondément marqué les sciences sociales critiques anglophones. L’exigence constante de formuler des arguments clairs, précis, de discuter le libéralisme en appliquant le principe de charité, d’en finir avec tout bullshit jargonnant ont assuré à cette branche de la théorie un succès certain, en philosophie éthique, en sociologie ou en économie politique. Souvent méprisé en France pour son prétendu « réformisme » ou son aversion à la dialectique, le marxisme analytique est pourtant un interlocuteur stimulant, une discipline intellectuelle à laquelle il est nécessaire de se plier ou, a minima, de se confronter. Dans ce guide de lecture, Fabien Tarrit déploie les enjeux de ce courant dans tous les domaines : comment reconstruire une théorie des classes qui soit cohérente ? peut-on maintenir la théorie de l’histoire issue de Marx ? à quelle condition la théorie de la valeur est-elle défendable ? qu’est-ce qu’une théorie marxiste de la justice ? Ces questions, toutes essentielles, indiquent bien la contribution qui peut être celle du marxisme analytique : offrir l’opportunité inestimable de clarifier les présupposés de la critique émancipatrice.
C’est au cours des années 1980 que le marxisme analytique (avec pour principaux auteurs Gerald A. Cohen, Jon Elster, John Roemer, Erik O. Wright, Robert Brenner, Adam Przeworski, Philippe Van Parijs) a connu l’apogée de sa visibilité, même si les débats que ce courant de pensée a ouverts se sont poursuivis et se poursuivent encore. En cherchant à reconstruire le marxisme sur des fondements méthodologiques extérieurs au marxisme, les auteurs de ce courant ont initié la possibilité d’une nouvelle interprétation du marxisme, leur objet étant le marxisme avant d’être le monde matériel.